Simone Weil


Note biographique.
Simone Weil est née à Paris en 1909 dans une famille juive cultivée. Son père était médecin. Elève d’Alain, elle devient agrégée et professeur de philosophie. Elle milite dans le mouvement anarchiste et se fait remarquer par son action politique et syndicale. Elle décide de partager le sort commun des hommes et travaille en usine de 1934 à 1935. Elle s’engage, en 1936, aux côtés des républicains dans la guerre civile d’Espagne. Elle dénonce l’Eglise catholique, ses excès passés et son blocage présent. Elle écarte la tradition juive (par rejet du méchant dieu biblique) au profit de la culture grecque idéalisée.

L’occupation de Paris, en juin 1940, lui fait gagner Marseille où elle rencontre le père Perrin avec qui elle approfondit la révélation chrétienne. Ouvrière agricole en Ardèche, elle poursuit sa découverte du Christ avec Gustave Thibon. Tandis que sa famille a trouvé refuge aux Etats-Unis, elle gagne Londres où elle travaille dans l’administration de la « France libre ». Malade, elle se laisse peu à peu mourir de faim en 1943.

Les écrits historiques forment une première leçon où le nazisme est vu comme une maladie de l’âme. Les écrits politiques donnent une deuxième leçon qui concerne la condition ouvrière. Les écrits spirituels constituent la troisième leçon. Ils datent des trois dernières années de sa vie. Dans les lettres au père Perrin, Simone Weil fait état de sa rencontre avec le Christ dans le seul à seul de l’expérience mystique.


La pesanteur et la grâce
Extraits

« Un mode de purification : prier Dieu, non seulement en secret par rapport aux hommes, mais en pensant que Dieu n’existe pas. » (Renoncement au temps)

« L’humilité a pour objet d’abolir l’imaginaire dans le progrès spirituel. Aucun inconvénient à se croire beaucoup moins avancé qu’on n’est : la lumière n’en opère pas moins son effet, dont la source n’est pas dans l’opinion. Beaucoup à se croire plus avancé, car alors l’opinion a un effet. » (Illusions)

« Dieu et le surnaturel sont cachés et sans forme dans l’univers. Il est bon qu’ils soient cachés et sans nom dans l’âme. Autrement, on risque d’avoir sous ce nom de l’imaginaire (ceux qui ont nourri et vêtu le Christ ne savaient pas que c’était le Christ). Sens des mystères antiques. Le christianisme (catholiques et protestants) parle trop de choses saintes. » (Ibid.)

« Amour imaginaire pour les créatures. On est attaché par une corde à tous les objets d’attachements, et une corde peut toujours se couper. On est aussi attaché par une corde au Dieu imaginaire, au Dieu pour qui l’amour est aussi un attachement. Mais au Dieu réel on n’est pas attaché, et c’est pourquoi il n’y a pas de corde qui puisse être coupée. Il entre en nous. Lui seul peut entrer en nous. Toutes les autres choses restent en dehors, et nous ne connaissons d’elles que les tensions de degré et de direction variables imprimées à la corde quand il y a déplacement d’elles ou de nous. » (Amour)

« Il faut que le mal soit rendu pur — ou la vie est impossible. Dieu seul peut cela. C’est l’idée de la Gîta. C’est aussi l’idée de Moïse, de Mahomet, de l’hitlérisme… Mais Jéhovah, Allah, Hitler sont des dieux terrestres. La purification qu’ils opèrent est imaginaire. » (Le mal)

« La non-violence n’est bonne que si elle est efficace. Ainsi, question du jeune homme à Gandhi concernant sa sœur. La réponse devrait être : use de la force, à moins que tu ne sois tel que tu puisses la défendre avec autant de probabilité de succès, sans violence. A moins que tu ne possèdes un rayonnement dont l’énergie (c’est-à-dire l’efficacité possible, au sens le plus matériel) soit égale à celle contenue dans tes muscles. S’efforce de devenir tel qu’on puisse être non-violent. » (La violence)

« Cas de contradictoires vrais. Dieu existe, Dieu n’existe pas. Où est le problème ? Je suis tout à fait sûre qu’il y a un Dieu, en ce sens que je suis tout à fait sûre que mon amour n’est pas illusoire. Je suis tout à fait sûre qu’il n’y a pas de Dieu, en ce sens que je suis tout à fait sûre que rien de réel ne ressemble à ce que je peux concevoir quand je prononce ce nom. Mais cela que je ne puis concevoir n’est pas une illusion. » (L’athéisme purificateur)

« Entre deux hommes qui n’ont pas l’expérience de Dieu, celui qui le nie en est peut-être le plus près. Le faux Dieu qui ressemble en tout au vrai, excepté qu’on ne le touche pas, empêche à jamais d’accéder au vrai. Croire en un Dieu qui ressemble en tout au vrai, excepté qu’il n’existe pas, car on ne se trouve pas au point où Dieu existe. » (Ibid.)

« La religion en tant que source de consolation est un obstacle à la véritable foi : en ce sens l’athéisme est une purification. Je dois être athée avec la partie de moi-même qui n’est pas faite pour Dieu. Parmi les hommes chez qui la partie surnaturelle d’eux-mêmes n’est pas éveillée, les athées ont raison et les croyants ont tort. » (Ibid.)

« L’attention absolument sans mélange est prière. » (L’attention et la volonté)

« Le poète produit le beau par l’attention fixée sur du réel. De même l’acte d’amour. Savoir que cet homme, qui a faim et soif, existe vraiment autant que moi — cela suffit, le reste suit de même. Les valeurs authentiques et pures de vrai, de beau et de bien dans l’activité d’un être humain se produisent par un seul et même acte, une certaine application à l’objet de la plénitude de l’attention. » (Ibid.)

« Méthode pour comprendre les images, les symboles, etc. Non pas essayer de les interpréter, mais les regarder jusqu’à ce que la lumière jaillisse. D’une manière générale, méthode d’exercer l’intelligence, qui consiste à regarder. Application de cette méthode pour la discrimination du réel et de l’illusoire. Dans la perception sensible, si on n’est pas sûr de ce qu’on voit, on se déplace en regardant, et le réel apparaît. Dans la vie intérieure, le temps tient lieu d’espace. Avec le temps on est modifié et si, à travers les modifications, on garde le regard orienté vers la même chose, en fin de compte l’illusion se dissipe et le réel apparaît. La condition est que l’attention soit un regard et non un attachement. » (Ibid.)

« La connaissance de la misère humaine est difficile au riche, au puissant, parce qu’il est presque invinciblement porté à croire qu’il est quelque chose. Elle est également difficile au misérable parce qu’il est presque invinciblement porté à croire que le riche, le puissant est quelque chose. » (Ibid.)

« Ce n’est pas la faute qui constitue le péché mortel, mais le degré de lumière qui est dans l’âme quand la faute, quelle qu’elle soit, est accomplie. » (Ibid.)

« Il n’y a pas d’autre critérium parfait du bien et du mal que la prière intérieure ininterrompue. Tout ce qui ne l’interrompt pas est permis, tout ce qui l’interrompt est défendu. Il est impossible de faire du mal à autrui quand on agit en état de prière. A condition que ce soit prière véritable. Mais avant d’en arriver là, il faut avoir usé sa volonté propre contre l’observation des règles. » (Dressage)

« Le rationnel au sens cartésien, c’est-à-dire le mécanisme, la nécessité humainement représentable, doit être supposé partout où on le peut, afin de mettre en lumière ce qui lui est irréductible. L’usage de la raison rend les choses transparentes à l’esprit. Mais on ne voit pas le transparent. On voit l’opaque à travers le transparent, l’opaque qui était caché quand le transparent n’était pas transparent. On voit ou les poussières sur la vitre, ou le paysage derrière la vitre, mais jamais la vitre elle-même. Nettoyer la poussière ne sert qu’à voir le paysage. La raison ne doit exercer sa fonction que pour parvenir aux vrais mystères, aux vrais indémontrables qui sont le réel. L’incompris cache l’incompréhensible, et pour ce motif doit être éliminé. » (L’intelligence et la grâce)

« Le nettoyage philosophique de la religion catholique n’a jamais été fait. Pour le faire, il faudrait être dedans et dehors. » (Ibid.)

« La conscience est abusée par le social. L’énergie supplémentaire (imaginative) est en grande partie suspendue au social. Il faut l’en détacher. C’est le détachement le plus difficile. La méditation sur le mécanisme social est à cet égard une purification de première importance. Contempler le social est une voie aussi bonne que se retirer du monde. C’est pourquoi je n’ai pas eu tort de côtoyer si longtemps la politique. » (Le gros animal)

« Dieu a fait à Moïse et à Josué des promesses purement temporelles à une époque où l’Egypte était tendue vers le salut éternel de l’âme. Les Hébreux, ayant refusé la révélation égyptienne, ont eu le Dieu qu’ils méritaient : un Dieu charnel et collectif qui n’a parlé jusqu’à l’exil à l’âme de personne (à moins que, dans les Psaumes) ?… Parmi les personnages des récits de l’Ancien Testament, Abel, Enoch, Noé, Melchisédech, Job, Daniel seuls sont purs. Il n’est pas étonnant qu’un peuple d’esclaves fugitifs, conquérants d’une terre paradisiaque aménagée par des civilisations au labeur des quelles ils n’avaient eu aucune part et qu’ils détruisirent par des massacres — qu’un tel peuple n’ait pu donner grand-chose de bon. Parler de « Dieu éducateur » au sujet de ce peuple est une atroce plaisanterie. Rien d’étonnant qu’il y ait tant de mal dans une civilisation — la nôtre — viciée à sa base et dans son inspiration même par cet affreux mensonge. La malédiction d’Israël pèse sur la chrétienté. Les atrocités, l’Inquisition, les exterminations d’hérétiques et d’infidèles, c’était Israël. Le capitalisme, c’était Israël, notamment chez ses pires ennemis. Il ne peut y avoir de contact « personnel » entre l’homme et Dieu que par la personne du Médiateur. En dehors du Médiateur, la présence de Dieu à l’homme ne peut être que collective, nationale. Israël a simultanément choisi le Dieu national et refusé le Médiateur ; il a peut-être tendu de temps à autre au véritable monothéisme, mais toujours il retombait, et ne pouvait pas ne pas retomber, au Dieu de tribu. » (Israël)

« Le christianisme primitif a fabriqué le poison de la notion de progrès par l’idée de la pédagogie divine formant les hommes pour les rendre capables de recevoir le message du Christ. Cela s’accordait avec l’espoir de la conversion universelle des nations et de la fin du monde comme phénomènes imminents. Mais aucun des deux ne s’étant produit, au bout de dix-sept siècles on a prolongé cette notion de progrès au-delà du moment de la Révélation chrétienne. Dès lors elle devait se retourner contre le christianisme. Les autres poisons mélangés à la vérité du christianisme sont d’origine juive. Celui-là est spécifiquement chrétien. La métaphore de la pédagogie divine dissout la destinée individuelle qui seule compte pour le salut, dans celle des peuples. Le christianisme a voulu chercher une harmonie dans l’histoire. C’est le germe de Hegel et de Marx. La notion d’histoire comme continuité dirigée est chrétienne. Il me semble qu’il y a peu d’idées plus complètement fausses. Chercher l’harmonie dans le devenir, dans ce qui est le contraire de l’éternité. Mauvaise union des contraires. L’humanisme et ce qui s’est ensuivi n’est pas un retour à l’Antiquité, mais un développement de poisons intérieurs au christianisme. » (Ibid.)


Lettre de Simone Weil
à Déodat Roché

Je viens de lire chez Ballard votre belle étude sur l’amour spirituel chez les cathares. J’avais déjà lu auparavant, grâce à Ballard, votre brochure sur le catharisme. Ces deux textes ont fait sur moi une vive impression.

Depuis longtemps déjà je suis vivement attirée vers les cathares, bien que sachant peu de choses à leur sujet. Une des principales raisons de cette attraction est leur opposition concernant l’Ancien Testament, que vous exprimez si bien dans votre article, où vous dites justement que l’adoration de la puissance a fait perdre aux Hébreux la notion du bien et du mal. Le rang de texte sacré accordé à des récits pleins de cruautés impitoyables m’a toujours tenue éloignée du christianisme, d’autant plus que depuis vingt siècles ces récits n’ont jamais cessé d’exercer une influence sur tous les courants de la pensée chrétienne ; si du moins on entend par le christianisme les Eglises aujourd’hui classées dans cette rubrique. Saint-François d’Assise lui-même, aussi pur de cette souillure qu’il est possible de l’être, a fondé un Ordre qui à peine créé a presque aussitôt pris part aux meurtres et aux massacres. Je n’ai jamais pu comprendre comment il est possible à un esprit raisonnable de regarder le Yahvé de la Bible et le Père invoqué dans l’Evangile comme un seul et même être. L’influence de l’Ancien Testament et celle de l’Empire Romain, dont la tradition a été continuée par la papauté, sont à mon avis les deux causes essentielles de la corruption du christianisme.

Vos études m’ont confirmée dans une pensée que j’avais déjà avant de les avoir lues, c’est que le catharisme a été en Europe la dernière expression vivante de l’antiquité pré-romaine. Je crois qu’avant les conquêtes romaines les pays méditerranéens et le Proche-Orient formaient une civilisation non pas homogène, car la diversité était grande d’un pays à l’autre, mais continue ; qu’une même pensée vivait chez les meilleurs esprits, exprimée sous diverses formes dans les mystères et les sectes initiatiques d’Egypte et de Thrace, de Grèce, de Perse, et que les ouvrages de Platon constituent l’expression la plus parfaite que nous possédions de cette pensée. Bien entendu, vu la rareté des documents, une telle opinion ne peut pas être prouvée ; mais entre autres indices Platon lui-même présente toujours sa doctrine comme issue d’une tradition antique, sans jamais indiquer le pays d’origine ; à mon avis, l’explication la plus simple est que les traditions philosophiques et religieuses des pays connus par lui se confondaient en une seule et même pensée. C’est de cette pensée que le christianisme est issu ; mais les gnostiques, les manichéens, les cathares semblent seuls lui être restés vraiment fidèles. Seuls ils ont vraiment échappé à la grossièreté d’esprit, à la bassesse du cœur que la domination romaine a répandues sur de vastes territoires et qui constituent aujourd’hui encore l’atmosphère de l’Europe.

Il y a chez les manichéens quelque chose de plus que dans l’antiquité, du moins l’antiquité connue de nous, quelques conceptions splendides, telles que la divinité descendant parmi les hommes et l’esprit déchiré, dispersé parmi la matière. Mais surtout ce qui fait du catharisme une espèce de miracle, c’est qu’il s’agissait d’une religion et non simplement d’une philosophie. Je veux dire qu’autour de Toulouse au XIIe siècle la plus haute pensée vivait dans un milieu humain et non pas seulement dans l’esprit d’un certain nombre d’individus. Car c’est là, il me semble, la seule différence entre la philosophie et la religion, dès lors qu’il s’agit d’une religion non dogmatique.

Une pensée n’atteint la plénitude d’existence qu’incarnée dans un milieu humain, et par milieu j’entends quelque chose d’ouvert au monde extérieur, qui baigne dans la société environnante, qui est en contact avec toute cette société, non pas simplement un groupe fermé de disciples autour d’un maître. Faute de pouvoir respirer l’atmosphère d’un tel milieu, un esprit supérieur se fait une philosophie ; mais c’est là une ressource de deuxième ordre, la pensée y atteint un degré de réalité moindre. Il y a eu vraisemblablement un milieu pythagoricien, mais nous ne savons presque rien à ce sujet. A l’époque de Platon il n’y avait plus rien de semblable, et l’on sent continuellement dans l’œuvre de Platon l’absence d’un tel milieu et le regret de cette absence, un regret nostalgique.

Excusez ces réflexions décousues ; je voulais simplement vous montrer que mon intérêt pour le catharisme ne procède pas d’une simple curiosité historique, ni même d’une simple curiosité intellectuelle. J’ai lu avec joie dans votre brochure que le catharisme peut être regardé comme un pythagorisme ou un platonisme chrétien ; car à mes yeux rien ne surpasse Platon. La simple curiosité intellectuelle ne peut mettre en contact avec la pensée de Pythagore et de Platon car à l’égard d’une telle pensée la connaissance et l’adhésion ne sont qu’une seule opération de l’esprit. Je pense de même au sujet du catharisme.

Jamais il n’a été si nécessaire qu’aujourd’hui de ressusciter cette forme de pensée. Nous sommes à une époque où la plupart des gens sentent confusément, mais vivement, que ce que l’on nommait au XVIIIe siècle les lumières constitue –y compris la science– une nourriture spirituelle insuffisante ; mais ce sentiment est en train de conduire l’humanité par les plus mauvais chemins. Il est urgent de se reporter, dans le passé, aux époques qui furent favorables à cette forme de vie spirituelle dont ce qu’il y a de plus précieux dans les sciences et les arts constitue simplement un reflet un peu dégradé. C’est pourquoi je souhaite vivement que vos études sur les cathares trouvent auprès du public l’attention et la diffusion qu’elles méritent. Mais des études sur ce thème, si belles qu’elles soient, ne peuvent suffire. Si vous pouviez trouver un éditeur, la publication de ce recueil de textes originaux, accessible au public, serait infiniment désirable.

Publié avec l’autorisation de « Spiritualité cathare - hier, aujourd’hui, demain »

Le matérialisme spirituel


"Un certain nombre de voies de traverse conduisent à un version distordue, égocentrique, de la vie spirituelle. Nous pouvons nous illusionner en pensant que nous nous développons spirituellement, alors qu'en fait nous usons de techniques spirituelles pour renforcer notre ego. cette distorsion fondamentale mérite le nom de matérialisme spirituel." C.T.


Chogyam Trungpa Rinpoché, fondateur de plusieurs communautés, et institut Naropa, onzième incarnation du Trungpa tülku, Chögyam Trungpa fut élevé, dès son enfance, en vue d'occuper la charge d'Abbé suprême des monastères de Surmang, a l'issue d'une éducation longue et difficile, il fut initié et couronné comme héritier des lignées de Milarépa, et de Padmasambhava. Celui qui apporta le bouddhisme tibétain en Occident.

Trungpa forcé de quitter son pays en 1959, passa trois ans en Inde, puis se rendit en Angleterre, à Oxford, où il mena des études de psychologie et de religion comparée. Après un séjour de quatre ans à Oxford, il fonda le premier centre bouddhiste tibétain d'étude et de méditation en Occident, Samyê-Ling en Ecosse. Il a enseigné à l'université du Colorado, et parcourt les Etats-Unis et le Canada.

La pratique de la voie tibétaine a été écrit suite à une suite de causeries dans les années 70.

Un certain nombre de détours conduisent à une version distordue, égocentrique de la spiritualité; nous pouvons nous illusionner en pensant que nous nous développons spirituellement, alors qu'en fait nous usons de techniques spirituelles pour renforcer notre ego. Cette distorsion fondamentale mérite le nom de matérialisme spirituel.

Dans l'approche bouddhiste, on part de la confusion et de la souffrance qui sont notre lot, et l'on s'emploie à démêler l'écheveau des causes. Dans l'approche déiste, on part la la richesse divine, et l'on tâche d'élever sa conscience lors que notre confusion et nos points négatifs sont un obstacle à la relation avec Dieu, l'approche déiste doit s'en occuper aussi. L'orgueil spirituel, par exemple, est tout à fait un problème commun aux disciplines déistes et au bouddhisme.

Tout ce qui a été créé doit, tôt au tard, périr. Si l'illumination était une création, l'ego pourrait toujours, se réaffirmant, causer un retour à l'état de confusion. L'illumination est permanente parce que nous ne l'avons pas produite, nous l'avons seulement découverte. Dans la tradition bouddhiste, on a souvent recours à l'image du soleil apparaissant derrière les nuages pour expliquer la découverte de l'illumination.

Dans la pratique de la méditation, nous chassons la confusion de l'ego pour entrevoir la lumière de l'éveil. Si nous savons nous débarrasser de l'ignorance, de l'encombrement intérieur, de la paranoïa, nous nous ouvrons à une vision fabuleuse de la vie. Le cœur de la confusion consiste en ce que chaque homme a une perception de soi qui lui parait être solide et continue. L'expérience menace sans cesse de nous révéler notre caractère transitoire, aussi tentons-nous continuellement de dissimuler toute possibilité de découvrir notre condition réelle. En cet effort pour maintenir la perception d'un soi solide et continu réside précisément l'action de l'ego.

Dans le bouddhisme tibétain, on a recours à une métaphore pour décrire le fonctionnement de l'ego, celle des "trois seigneurs du matérialisme"...

- le seigneur de la forme, concerne la quête névrotique de confort, de sécurité et de plaisir, efforts en vue de créer un monde contrôlable et sûr, prévisible et agréable.

- seigneur de la parole concerne l'emploi de l'intellect dans la relation à notre monde. Les idéologies, systèmes d'idées qui rationalisent, justifient et sanctifient nos vies, sont les produits le splus pleinement développés de cette tendance. (tous les "isme" nous munissent d'identités, règles, interprétations, comme nationalisme, communisme, existentialisme, bouddhisme... le seigneur de la parole se réfère à cette inclination de l'ego à interpréter tout ce qui le menace ou l'irrite de façon a neutraliser la menace ou à la convertir en quelque chose de "positif" de son point de vue.

- le seigneur de l'esprit concerne l'effort de la conscience en vue de rester consciente d'elle-même. Il règne lorsque nous nous servons de disciplines psychologiques et spirituelles en vue de maintenir ou de retenir notre conscience de soi. Le yoga, prière, méditation, transe, psychanalyse peuvent être utilisés de cette manière.

L'ego est capable de tout annexer à ses propres fins, y compris la spiritualité.

Comme l'ego est d'apparence solide et qu'il ne peut pas véritablement absorber quoi que ce soit, il se borne à imiter. Aussi s'efforce-t-il d'examiner et d'imiter la pratique de la méditation et le mode de vie spirituel, l'on connaît les ficelles, on essaye automatiquement d'imiter la spiritualité, dès lors qu'un engagement véritable exigerait l'élimination complète de l'ego et qu'à vrai dire, abandonner complètement l'ego est bien la dernière chose que l'on souhaite faire!

Si nous réussissons à maintenir, notre conscience de soi en usant de techniques spirituelles, un développement spirituel authentique est hautement improbable. Nos habitudes mentales deviennent si fortes qu'il est difficile de les pénétrer, Nous pouvons même aller jusqu'au point d'atteindre l'état totalement démoniaque d'égoïté" complète.

La méthode découverte par le Bouddha est la méditation. Il découvrit qu'il ne sert à rien de lutter pour trouver des réponses. Il commença à réaliser qu'il y avait en lui une qualité sainte, éveillée, qui ne se manifestait qu'en l'absence de lutte. Ainsi la pratique de la méditation implique-t-elle le "laisser-être".

Les cordes ni trop tendues, ni trop lâches. il en est de même de la pratique de la méditation, dit le bouddha, tu ne dois rien imposer de force à ton esprit, ni le laisser vagabonder. c'est l'enseignement qui consiste à laisser l'esprit ETRE ouvertement, à sentir le flux de l'énergie sans chercher à le dominer et sans cesser de la contrôler, à s'harmoniser avec la structure énergétique de l'esprit. c'est la pratique de la méditation.

La méditation doit commencer par la couche la plus superficielle de l'ego : les pensées discursives qui traversent continuellement notre esprit, notre bavardage mental. Dans la véritable méditation, on ne cherche ni à agiter les formations mentales, ni à les supprimer. On les laisse survenir spontanément et devenir une expression de notre santé fondamentale. Elles deviennent l'expression de la précision et de la clarté de l'état d'esprit éveillé.

Si l'on pénètre la stratégie consistant à créer des pensées, qui se chevauchent continuellement, alors les seigneurs agitent des émotions pour nous distraire. La qualité excitante, colorée, dramatique de ces émotions capte notre attention et nous absorbe comme le ferait un bon film. Dans la pratique de la méditation, on ne les encourage pas, et on ne les réprime pas non plus. En les voyant clairement, en les laissant être ce qu'elles sont, on ne les laisse pas plus longtemps nous distraire et nous divertir. En l'absence de pensées et d'émotions, les seigneurs sortent une arme encore plus puissante : LES CONCEPTS.

Étiquetés, les phénomènes produisent l'illusion d'un monde fini de "choses" solides. Un tel monde solide nous assure que nous aussi sommes quelque chose de solide, de continu.

L'ego tente constamment d'acquérir et d'appliquer les enseignements spirituels à son propre bénéfice.

Il nous faut pourfendre la rationalisation du sentir spirituel et de nos propres actions, et aller au-delà, si nous voulons réaliser la véritable spiritualité. Mais in n'est pas facile d'aborder une telle rationalisation, parce que tout est vu à travers le filtre de la philosophie et de la logique de l'ego, de sorte que tout paraît clair, précis et cohérent. A chaque question, nous tâchons de trouver une réponse qui nous justifie.

Il est important de voir que le point essentiel de toute pratique spirituelle est de sortir de la bureaucratie de l'ego, de ce constant désir qu'a l'ego d'une forme plus haute, plus spirituelle, plus transcendante du savoir, de la religion, de la vertu, de la discrimination, du confort, sortir du matérialisme spirituel. Le véritable amateur d'art n'accumule ni le savoir ni la beauté, il jouit pleinement de chaque objet. C'est fondamental. Si l'on apprécie réellement un bel objet, on s'identifie complètement avec lui et l'on s'oublie soi-même.

Si nous considérons la connaissance comme une "sagesse antique" à amasser, nous faisons fausse route!

Il ne faut pas imiter le Maître, essayer de devenir un double du Maître, les enseignements sont une expérience absolument personnelle. Il faut s'accorder la faveur de se faire confiance, se fier à sa propre intelligence. Nous sommes des gens extraordinaires qui avons en nous des choses fabuleuses. Simplement, il nous faut nous laisser être.

Les mécanismes de défense de l'ego impliquent que l'on se vérifie, ce qui est une forme superflue d'introspection. La méditation ne signifie pas méditer sur un objet particulier en se vérifiant, on s'identifie complètement avec les techniques que l'on emploie, quelles qu'elles soient. Dès lors on ne s'efforce pas de se sécuriser par la pratique de la méditation. Les gens ont peur de la vacuité de l'espace, de l'absence de compagnie, de l'absence d'ombre.

Nous devrions arrêter d'essayer de nous protéger et de nous améliorer. Il est possible que nous ayons entrevu la futilité de notre combat et que nous souhaitions lâcher prise, abandonner complètement nos efforts pour nous défendre.

Le Lâcher prise, signifie s'ouvrir complètement, essayer d'aller au-delà de la fascination et de l'attente. Lâcher prise, cela veut aussi dire que l'on reconnaît les qualités rudes, grossières, maladroites et choquantes de son propre ego, et que cette reconnaissance est un abandon.

Se tenir en estime ou se blâmer, ce sont là fondamentalement des tendances névrotiques qui proviennent de ce que nous n'avons pas suffisamment confiance en nous-mêmes, "confiance" dans le sens de voir ce que nous sommes, savoir ce que nous sommes, et savoir que nous pouvons nous permettre de nous ouvrir. La déception est le meilleur véhicule que l'on puisse utiliser sur le sentier du dharma. Elle infirme l'exitence de notre ego et de ses rêves.

Il est encore une autre façon de nous retenir, de ne pas lâcher réellement prise, lorsque nous avons le sentiment d'être des gens très fins, des gens sophistiqués et dignes. "Je ne vais certainement pas m'abandonner à cette réalité de la rue, sale et ordinaire".

Traditionnellement, l'abandon est symbolisé par des pratiques comme la prosternation, en même temps, on s'ouvre complètement en s'identifiant avec ce qu'il y a de plus bas, en reconnaissant notre caractère brut et grossier. Ainsi, on se prépare à être un réceptacle vide, prêt à recevoir les enseignements.

...

(...) ce qui compte, c'est combien vous vous êtes fréquenté vous-même. Pour nous ouvrir, il nous faut pourfendre notre désir de préserver nos existence propre. Alors nous pouvons voir la situation clairement, telle qu'elle est, et avoir une action juste. Le point fondamental est qu'il est inutile de lutter si vous voulez vous ouvrir,. Une fois que vous avez engagé vos pas dans le sentier, si vous abandonnez la lutte, cela règle tout le problème. L'instinct simiesque de l'ego se dissout, parce qu'il est fondé sur de l'information de seconde main, plutôt que sur l'expérience directe de ce qui est. LA LUTTE EST L'EGO.

Dès que l'on essaie de démêler le passé, alors on entre dans l'ambition et la lutte dans le moment présent, sans être capable de l'accepter tel qu'il est. C'est une solution très lâche. Il n'est pas sain de considérer notre thérapeute ou notre gourou comme un sauveur. Il nous faut travailler sur nous-mêmes. Il n'y a pas d'autre alternative.

L'étape suivante dans le sentier de l'auto-illusion est-elle le désir de voir des miracles.

Nous commençons à réaliser que l'auto-illusion ne fonctionne pas du tout, que c'est une simple tentative de nous réconforter, de rester en contact avec nous-mêmes, intérieurement, de nous prouver quelque chose, plutôt que d'être réellement ouverts. Peut être en viendrons-nous à nous punir nous-mêmes : "Si j'essaye de ne pas m'illusionner, c'est une nouvelle sorte d'auto-illusion; et si j'essaye d'éviter cela, je m'illusionne encore. Comment me libérer?... ainsi continue la réaction en chaîne sans fin....

(...)

La douleur, c'est ce que nous vivrons si nous n'arrivons pas à comprendre que l'exigence de base pour marcher sur la voie spirituelle, c'est l'inespoir. L'inespoir n'a rien à voir avec le désespoir. Il y a une différence. Le désespoir, c'est de la paresse, un intellect insuffisant. On n'est même pas disposé à chercher la raison du désespoir. C'est un bide total. L'inespoir, en revanche, est très intelligent. On n'arrête pas de chercher. On tourne une page après l'autre en disant: "C'est sans espoir, c'est sans espoir". On reste extrêmement vigoureux, inespérément vigoureux. On cherche encore des lueurs d'espoir, mais chaque fois on finit par se dire: "Ah non ! Beurk !" L'inespoir n'arrête pas; il est très vigoureux, c'est une grande source d'inspiration. Il chatouille l'esprit comme si nous étions sur le point de découvrir quelque chose. Au moment de la découverte, nous disons: "Ah, enfin, j'ai trouvé !... Ah, non. C'est la même rengaine qui rapplique."

L'inespoir renferme un pari et une excitation démesurés. Quand nous cédons, quand nous entrons dans un désespoir profond, d'inespoir en inespoir, juste avant que le désespoir et la paresse nous dominent, c'est alors que nous commençons à acquérir le sens de l'humour, ce qui nous empêche de devenir roi des paresseux et des imbéciles. (Jeu d'illusion)...

"Le problème est que nous cherchons une réponse facile et indolore. Mais ce type de solution est inopérant sur le sentier spirituel, sur lequel nous n’aurions peut-être pas dû nous engager. Mais une fois que nous y sommes, c’est dur, c’est douloureux, et nous allons en baver. Nous nous sommes engagés dans la souffrance consistant à nous exposer, à nous déshabiller, à donner notre peau, nos nerfs, notre cœur, notre cerveau, jusqu'à ce que nous soyons offerts à l’univers. Rien ne doit rester. Ce sera terrible, crucifiant, mais c’est comme ça."

L'Évangile deTHOMAS


L'ÉVANGILE SELON THOMAS

Voici les paroles cachées que Jésus le Vivant a dites et qu'a transcrites Didyme Jude Thomas.

Et il a dit : « Celui qui parvient à l'interprétation de ces paroles ne goûtera point la mort ! »


1. Jésus dit : « Que celui qui cherche ne cesse point de chercher jusqu'à ce qu'il trouve : lorsqu'il trouvera, il sera ému; et lorsqu'il sera ému, il admirera, et il régnera sur l'univers ! »

2. Jésus dit : « Si ceux qui vous entraînent vous disent : " Voici, le Royaume est dans le ciel ! "&emdash;alors, les oiseaux du ciel y seront avant vous. S'ils vous disent : " Il est dans la mer ! "&emdash;alors, les poissons y seront avant vous. Mais le Royaume est au-dedans de vous et il est au- dehors de vous ! »

3. « Lorsque vous vous connaîtrez, alors on vous connaîtra, et vous saurez que c'est vous les fils du Père qui est vivant. Mais si vous ne vous connaissez point, alors vous serez dans un dénuement, et c'est vous [qui serez] le dénuement ! »

4. Jésus dit : « Que le vieillard chargé de jours ne tarde pas à interroger le petit enfant de sept jours sur le Lieu de la Vie, et il vivra ! Car il apparaîtra que beaucoup de premiers seront derniers, et ils deviendront un [seul] ! »

5. Jésus dit : « Connais ce qui est en face de ton visage, et ce qui t'est caché se révélera à toi. Car rien de caché ne manquera d'être révélé ! »

6. Ses disciples l'interrogèrent; ils lui dirent : « Tu veux que nous jeûnions ? Quelle est la manière dont nous prierons, dont nous ferons l'aumône, et quelle façon de se nourrir respecterons-nous ? »
Jésus dit : « Ne dites point de mensonge et, ce que vous avez en haine, ne le faites point : car toutes ces choses sont manifestes à la face du ciel; rien de ce qui est caché ne manquera d'être révélé et rien de ce qui est dissimulé ne tardera à être publié ! »

7. Jésus dit : « Bienheureux est ce lion que l'homme mangera en sorte que le lion devienne homme. Mais maudit est l'homme que le lion mangera en sorte que le lion devienne homme ! »

8. Puis il dit que : « L'homme est pareil à un sage pêcheur qui a jeté son filet dans la mer. Il l'a remonté de la mer plein de petits poissons au milieu desquels ce sage pêcheur a trouvé un poisson grand et excellent. Il a rejeté tous les petits poissons dans la mer; sans hésiter il a choisi le grand poisson. Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ! »

9. Jésus dit : « Voici; le semeur est sorti. Il a empli sa main et il a jeté. [Des grains,] les uns sont tombés sur la route : les oiseaux sont venus et les ont recueillis. D'autres sont tombés sur le roc : ils n'ont point trouvé à s'enraciner dans la terre et n'ont point produit d'épis vers le haut. D'autres sont tombés sur les épines : [elles] ont étouffé la graine, et le ver a mangé ces [semences]. D'autres sont tombés sur la bonne terre et cette [portion] a fait monter un fruit excellent : elle a donné jusqu'à soixante par mesure, et [même] cent vingt par mesure ! »

10. Jésus dit : « J'ai jeté un feu sur l'univers, et voici : je veille sur lui jusqu'à ce qu'il embrase ! »

11. Jésus dit : « Ce ciel passera, et celui qui est au-dessus de lui passera : mais ceux qui sont morts ne vivront point, et ceux qui vivent ne mourront point. »

12. Aujourd'hui, vous mangez des choses mortes et vous en faites ce qui est vivant : [mais] lorsque vous serez dans la Lumière, que ferez-vous en ce jour-là où, étant un, vous deviendrez deux; et lorsque vous deviendrez deux, qu'est-ce alors que vous ferez ? »

13. Les disciples disent à Jésus : « Nous savons que Tu nous quitteras : qui, au-dessus de nous, sera [alors] le [plus] grand? » Jésus leur dit : « Là où vous irez, vous vous rendrez vers Jacques le Juste, celui à cause duquel le ciel ainsi que la terre ont été produits. »

14. Jésus dit à ses disciples : « Comparez-moi, et dites- moi à qui je suis semblable. » Simon Pierre lui dit : « Tu es semblable à un ange juste ! » Matthieu lui dit : « Tu es semblable à un homme sage et philosophe ! » Thomas lui dit : « Maître, à qui tu es semblable, pour que je le dise mon visage ne parvient absolument point à le saisir. »
Jésus dit : « Je ne suis point ton maître; car tu as bu : tu t'es enivré de la source bouillonnante qui est à moi et que j'ai répandue. » Puis il le prit et s'écarta : il lui dit trois mots. Et, lorsque Thomas revint vers ses compagnons, ils le questionnèrent : « Qu'est-ce que Jésus t'a dit ? » &emdash; et Thomas leur répondit : « Si je vous dis une seule des paroles qu'il m'a dites, vous prendrez des pierres et me les jetterez, et un feu sortira des pierres et vous consumera ! »

15. Jésus leur dit : « Lorsque vous jeûnerez, vous engendrerez pour vous-mêmes un péché; lorsque vous prierez, on vous condamnera; lorsque vous ferez l'aumône, vous accomplirez un mal pour vos esprits ! Quand vous pénétrerez en n'importe quelle terre et que vousparcourrez les campagnes, lorsque l'on vous accueillera, mangez ce que l'on mettra devant vous; ceux qui sont malades dans ces endroits, guérissez-les. Car ce qui entrera dans votre bouche ne vous souillera point, mais ce qui sort de votre bouche, c'est cela qui vous souillera ! »

16. Jésus dit : « Quand vous voyez celui qui n'a pas été engendré de la femme, prosternez-vous, visage contre terre, et adorez-le : Celui-ci est votre père ! »

17. Jésus dit : « Certainement les hommes pensent que je suis venu pour jeter une paix sur l'univers. Mais ils ne savent pas que je suis venu pour jeter sur terre des discordes, le feu, l'épée, la guerre. Si en effet il y a cinq dans une maison, ils se trouveront trois contre deux et deux contre trois &emdash;père contre fils et fils contre père&emdash; et ils se lèveront en étant des solitaires. »

18. Jésus dit : « Je vous donnerai ce que jamais œil n'a vu, et ce que jamais oreille n'a entendu, et ce que jamais main n'a atteint, et cela qui n'est jamais monté au coeur de l'homme. »

19. Les disciples disent à Jésus : « Dis-nous comment votre fin sera. » Jésus dit : « Avez-vous donc dévoilé le commencement, pour que vous questionniez sur la fin ? Car là où est le commencement, là sera la fin. Bienheureux est celui qui atteindra le commencement : il connaîtra la fin, et il ne goûtera point la mort I ! »

20. Jésus dit :« Bienheureux celui qui a existé avant qu'il ait été produit !»

21. « Si vous devenez pour moi des disciples et que vous écoutiez mes paroles, ces pierres vous serviront. »

22. « Car vous avez là, dans le Paradis, cinq arbres qui ne changent été ni hiver, et dont les feuilles ne tombent point : celui qui les connaîtra ne goûtera point la mort ! »

23. Les disciples disent à Jésus : « Dis-nous à qui est semblable le Royaume des cieux ! » Il leur a dit : « Il est pareil à une graine de sénevé : elle est plus petite que toutes les [autres] semences, mais, lorsqu'elle tombe sur la terre labourée, elle produit une grande tige et devient un abri pour les oiseaux du ciel. »

24. Marie dit à Jésus : « A qui tes disciples sont-ils semblables? » Il lui a dit : « Ils sont semblables à de petits enfants qui ont pénétré dans un champ qui ne leur appartient pas. Lorsque les propriétaires du champ viendront, ils diront : " Quittez-nous notre champ! " Eux [donc], ils se dépouillent en présence de ces [gens] pour leur laisser leur champ et le leur rendre. »

25. « C'est pourquoi je vous dis ceci. Si le maître de maison sait que le voleur vient, il veillera avant que celui- là arrive et il ne laissera pas se percer une entrée dans la demeure de sa royauté pour en emporter ses meubles. Vous donc, soyez vigilants face à l'univers. Ceignez vos reins avec une grande énergie, afin que les brigands ne trouvent pas de moyen de vous atteindre; car le besoin que vous guettez, ils le trouveront! »

26. Qu'il y ait au milieu de vous un [tel] homme avisé : lorsque le fruit est venu, en hâte, sa faucille à la main, il est allé et il l'a moissonné. Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ! »

27. Jésus vit des petits qui tétaient; il dit à ses disciples : « Ces petits qui tettent sont semblables à ceux qui entrent dans le Royaume. » Eux lui dirent : « Si nous sommes petits, entrerons-nous dans le Royaume ? » Jésus leur dit : « Lorsque vous ferez les deux [être] un, et que vous ferez le dedans comme le dehors et le dehors comme le dedans, et le haut comme le bas ! Et si vous faites le mâle et la femelle en un seul, afin que le mâle ne soit plus mâle et que la femelle ne soit plus femelle l, et lorsqu'à la place d'un œil vous referez des yeux, et une main à la place d'une main, et un pied à la place d'un pied, et une image à la place d'une image, alors vous entrerez dans le [Royaume] ! »

28. Jésus dit : « Je vous choisirai, un entre mille et deux entre dix mille, et [ceux-ci] se lèveront étant un ! »

29. Ses disciples lui disent : « Instruis-nous sur le lieu où tu es, car il nous est nécessaire de questionner à son sujet ! » Il leur dit : « Que celui qui a des oreilles entende ! Si une lumière existe au-dedans d'une créature lumineuse, alors elle illumine l'univers tout entier; mais si elle n'illumine point, [c'est qu'elle] est une ténèbre. »

30. Jésus dit : « Aime ton frère comme ton âme; veille sur lui comme [sur] la prunelle de ton œil. »

31. Jésus dit : « La paille qui est dans l'œil de ton frère, tu la vois; mais la poutre qui est dans ton œil, tu ne la vois point ! Lorsque tu auras rejeté la poutre qui est dans ton œil, alors tu y verras pour rejeter la paille hors de l'œil de ton frère. »

32. Si vous ne jeûnez pas au monde, vous ne trouverez point le Royaume. Si vous ne faites point du Sabbat le [vrai] Sabbat, vous ne verrez point le Père. »

33. Jésus dit : « Je me suis tenu au milieu de l'univers et, dans la chair, je me suis manifesté à ceux-ci. Je les ai tous trouvés qui étaient ivres; je n'en ai trouvé aucun assoiffé parmi eux. Et mon âme s'est affligée pour les enfants des hommes. Parce qu'ils sont des aveugles dans leur cœur et qu'ils ne voient pas, parce qu'ils sont venus au monde étant vides, ils cherchent encore à sortir du monde étant vides ! Qu'il vienne cependant quelqu'un qui les redresse ! Alors, quand ils auront cuvé leur vin, ils se repentiront. »

34. Jésus dit : « Si la chair s'est produite à cause de l'esprit, c'est un miracle. Mais si l'esprit [s'est produit] à cause du corps, c'est un miracle de miracle. Mais moi, je m'émerveille de cela parce que le [...........de] cette (?) grande richesse a demeuré dans cette pauvreté. »

35. Jésus dit : « Là où il y a trois dieux, ce sont des dieux. Là où sont deux, ou [bien] un, je suis avec lui ! »

36. Jésus dit : « Un prophète n'est pas reçu dans sa ville, et un médecin n'opère point de guérison sur ceux qui le connaissent. »

37. Jésus dit : « Une ville qui est édifiée sur une montagne élevée, et qui est forte, il n'est pas possible qu'elle tombe, et l'on ne peut la cacher ! »

38. Jésus dit : « Ce que tu entendras de ton oreille, et de l'autre oreille, proclame-le sur vos toits ! Car personne n'allume une lampe et ne la met sous le boisseau ou ne la met dans un endroit caché : mais il la place sur le candélabre afin que tous ceux qui entrent et sortent voient sa lumière.»

39. Jésus dit : « Si un aveugle conduit un autre aveugle, tous les deux tombent dans une fosse. »

40. Jésus dit : « Il n'est pas possible que quelqu'un entre dans la maison du puissant et qu'il lui fasse violence s'il ne lui a point lié les mains : alors [seulement] il dévalisera sa maison . »

41. Jésus dit : « N'ayez point souci, du matin au soir et du soir au matin, de ce que vous revêtirez ! »

42. Ses disciples lui disent : « Quel jour nous apparaîtras-tu, et quel jour te verrons-nous ? » Jésus dit : « Lors- que vous vous dépouillerez sans que vous ayez honte, que vous ôterez vos vêtements et les déposerez à vos pieds à la manière des petits enfants, et que vous les piétinerez ! Alors [vous deviendrez] les fils de Celui qui est vivant, et vous n'aurez plus de crainte. »

43. Jésus dit : « Vous avez désiré bien des fois entendre ces paroles-ci que je vous dis, mais vous n'avez pas eu un autre de qui les entendre. Il viendra des jours où vous me chercherez, et où vous ne me trouverez pas.»

44. Jésus dit : « Les pharisiens et les scribes ont pris les clés de la science et les ont cachées : ils ne sont point entrés et ils n'ont pas, non plus, laissé [entrer] ceux qui voulaient entrer. Mais vous, soyez prudents comme les serpents et simples comme les colombes ! »

45. Jésus dit : « Un cep de vigne a été planté au dehors du Père. Il ne s'est point fortifié : on l'arrachera jusqu'à sa racine et il périra. »

46. Jésus dit : « Celui qui a dans sa main, on lui donnera. Mais celui qui n'a pas, [même] le peu qu'il a lui sera enlevé ! »

47. Jésus dit : « Soyez, vous, [comme] des passants ! »

48. Ses disciples lui dirent : « Qui es-tu, toi qui nous dis ces choses? &emdash;Par les choses que je vous dis, ne reconnaissez-vous pas qui je suis ? Mais vous êtes, vous- mêmes, devenus pareils aux Juifs : ils aiment l'arbre et ils détestent son fruit, ils aiment le fruit et ils détestent l'arbre ! »

49. Jésus dit : « Qui a blasphémé contre le Père, on lui pardonnera, et qui a blasphémé contre le Fils, on lui par- donnera : mais celui qui a blasphémé contre l'Esprit saint, on ne lui pardonnera point, ni sur terre ni dans le ciel. »

50. Jésus dit : « On ne récolte point de raisin sur les ronces, et l'on ne cueille point de figues sur l'épine- blanche : elles ne donnent pas de fruit ! [... un] homme bon tire de son grenier ce qui est bon, mais un homme pervers tire de son grenier pervers&emdash;qui est dans son cœur &emdash; des [choses] mauvaises, et il en sème de mauvaises parce que [ce sont ] des [choses] mauvaises [qu'] il tire de l'outrance de son coeur~. »

51. Jésus dit : « Depuis Adam jusqu'à Jean Baptiste, parmi ceux qui ont été engendrés de femmes il n'en est point de plus grand que Jean-Baptiste ! Mais, de crainte que les yeux [d'un tel] ne se perdent j'ai dit : Celui qui parmi vous sera [le plus ] petit connaîtra le Royaume et sera plus élevé que Jean ! »

52. Jésus dit : « Il n'est pas possible qu'un homme monte deux chevaux, ni qu'il tende deux arcs. Et il n'est pas possible qu'un domestique serve deux maîtres : sinon, il honorera l'un et l'autre le rudoiera ! Jamais homme ne boit du vin vieux et ne désire au même instant boire du vin nouveau; on ne verse pas du vin nouveau dans de vieilles outres, pour qu'elles ne se fendent point, et l'on ne verse pas du vin vieux dans des outres neuves, afin qu'il ne se gâte. On ne coud pas un vieux morceau à un vêtement neuf, car une déchirure se produirait. »

53. Jésus dit : « Si deux sont l'un avec l'autre en paix dans la même maison, ils diront à la montagne : " Déplace-toi ! "&emdash;et elle se déplacera.»

54. Jésus dit : « Bienheureux les solitaires et les élus, car vous trouverez le Royaume ! Parce que vous êtes issus de lui, de nouveau vous y retournerez. »

55. Jésus dit : « Si les gens vous demandent : " D'où êtes-vous venus ? "&emdash;dites-leur : " Nous sommes venus de la Lumière, du lieu où la Lumière s'est produite [ ..... ] hors de lui-même [ou : d'elle-même ?]- Il [........]....... jusqu'à ce qu'ils manifestent? ....[..... ......] leur image. " Si l'on vous dit : "Qui êtes-vous ? "&emdash;dites : " Nous sommes ses fils et nous sommes les élus du Père qui est vivant. " Si [les gens] vous demandent : " Quel signe de votre Père est en vous? " &emdash; dites-leur : " C'est un mouvement et un repos l. »

56. Ses disciples lui dirent : « Quel jour le repos de ceux qui sont morts se produira-t-il, et quel jour sera-ce que le monde nouveau viendra ? » Il leur a dit : « Ce [repos] que vous attendez est [déjà] venu, et vous ne l'avez point reconnu. »

57. Ses disciples lui dirent : « Vingt-quatre prophètes ont parlé en Israël et tous, ils se sont exprimés en toi ! » Il leur a dit : « Vous avez délaissé Celui qui est vivant en face de vous, et vous avez parlé des morts ! »

58. Ses disciples lui dirent : « La circoncision est-elle utile ou non ? » Il leur a dit : « Si elle était utile, leur père les engendrerait de leur mère [tout] circoncis. Mais [seule] la véritable circoncision dans l'esprit donne tout le profit ! »

59. Jésus dit : « Bienheureux les pauvres, car le Royaume des cieux est à vous ! »

60. Jésus dit : « Celui qui ne haïra pas son père et sa mère ne pourra être mon disciple; et s'il ne hait point son frère et sa sœur et ne prend pas sa croix comme moi, il ne deviendra pas digne de moi ! »

61. Jésus dit : « Celui qui a connu le monde est tombé dans un cadavre; et, celui qui est tombé dans un cadavre, le monde n'est plus digne de lui!»

62. Jésus dit : « Le Royaume du Père est pareil à un homme qui a une [bonne] semence [dans son champ]. La nuit, son ennemi est venu et a semé de l'ivraie par-dessus la semence qui est bonne. [Mais] cet homme ne les [ ses Serviteurs] a pas laissés arracher l'ivraie, « de crainte&emdash; leur a-t-il dit&emdash; qu'en allant ôter l'ivraie vous n'enleviez avec elle le froment. En effet, au jour de la moisson, les ivraies seront devenues reconnaissables : on les ôtera et on les brûlera l. »

63. Jésus dit : « Bienheureux l'homme qui a peiné : il a trouvé la Vie ! »

64. Jésus dit : « Tournez vos regards vers Celui qui est vivant, tant que vous êtes vivants, afin que vous ne mouriez point&emdash;et cherchez à le voir ! Vous ne pourrez voir un Samaritain qui porte un agneau et qui entre dans la Judée. » Ceci, c'est au sujet de l'agneau qu'il l'a dit à ses disciples, et ils lui ont répondu : « Il le tuera et le mangera ! » Mais il leur a dit : « Il ne le mangera point tant que [celui-ci] est vivant, mais seulement s'il le tue et que celui-ci devienne cadavre. » Ils lui dirent : « En nulle autre façon il ne le blessera ! » Il leur a dit [alors] : « Vous-mêmes, cherchez-vous donc un lieu de repos, afin que vous ne deveniez point des cadavres et que l'on ne vous mange point ! »

65. Jésus dit : « Deux se reposeront là sur un lit : l'un mourra, I'autre vivra. » Salomé dit : « Qui es-tu homme; de qui es-tu [issu] , pour être monté sur mon lit et avoir mangé à ma table ? » Jésus lui dit : « Je suis celui qui s'est produit de Celui qui [m']est égal : on m'a donné de ce qui est à mon Père !&emdash;Je suis ta disciple !&emdash;A cause de cela, je dis ceci : Lorsqu,'[un] se trouvera désert, il sera plein de lumière; mais lorsqu'il se trouvera divisé, il sera plein de ténèbres. »

66. Jésus dit : « Quand je dis mes mystères à [...... ...] ... mystère : [ce que] ta main droite fera, que ta main gauche ignore [qu']elle le fait. »

67. Jésus dit : « Il y avait un homme riche qui avait beaucoup de biens. Il [se] dit : " J'userai de mes biens afin d'ensemencer mon champ, de planter, de remplir mes greniers de récoltes, de sorte que le besoin ne me touche pas." Telles étaient les choses qu'il pensait en son cœur. Mais, pendant cette nuit-là, il mourut. Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ! »

68. Jésus dit : « Un homme avait des hôtes. Lorsqu'il eut préparé le festin, il envoya son serviteur pour appeler ces hôtes. Celui-ci alla chez le premier et lui dit : " Mon maître t'invite ! " [L'autre] répondit : " J'ai de l'argent à recevoir de marchands; ils viennent vers moi ce soir et j'irai pour leur donner des ordres. Je m'excuse pour le festin. " [Le domestique] alla chez un autre et lui dit : " Mon maître t'a invité. " [Celui-ci] lui dit : " J'ai acheté une maison et l'on me demande une journée : je ne suis pas libre. " Il alla vers un autre et lui dit : " Mon maître t'invite! " [Celui-ci] lui répondit : " Mon ami va se marier, et c'est moi qui ferai [son] festin. Je n'irai pas : je m'excuse pour le festin ! " Il alla vers un autre et il lui dit : " Mon maître t'invite ! " [Celui-ci] lui dit : " J'ai acheté un champ? et je ne suis pas encore allé [en] recevoir le revenu. Je ne viendrai pas : je m'excuse pour le festin ! " Le serviteur revint et dit à son maître : " Ceux que tu as invités au festin se sont excusés. " Le maître dit à son serviteur : " Va dehors, dans les rues, et ceux que tu trouveras, amène-les pour qu'ils dînent. " Les acheteurs et les mar[chands n'entreront] pas dans les lieux de mon Père ! »

69. Il a dit : « Un homme [important] avait un vignoble qu'il avait donné à des cultivateurs pour qu'ils le travaillent et qu'il en reçoive d'eux le fruit. Il envoya son serviteur pour que les cultivateurs lui donnent le fruit du vignoble : [mais] ceux-ci s'emparèrent de son serviteur, ils le frappèrent et il s'en fallut de peu qu'ils ne le tuent. Le serviteur revint et le dit à son maître. Son maître [se] dit : " Peut-être ne les a-t-il pas reconnus ? " Il envoya un autre serviteur : cet autre aussi, les cultivateurs le frappèrent. Alors, le maître envoya son fils : il se dit : " Sans doute respecteront-ils mon enfant ? " Mais, quand ils surent que celui-ci était l'héritier du vignoble, ces cultivateurs le saisirent et le tuèrent. Que celui qui a des oreilles entende l ! »

70. Jésus dit : « Puisses-tu m'enseigner cette pierre que ceux qui construisent ont rejetée ! C'est elle, la pierre de l'angle . »

71. Jésus dit : « Celui qui connaît le Tout, qui n'a besoin que de lui-même, il a besoin de tout le Lieu ! »

72. Jésus dit : « Bienheureux serez-vous lorsque l'on vous haïra et que l'on vous persécutera; mais ils ne trouveront pas de place dans ce lieu [jusqu']auquel ils vous auront poursuivis ! »

73. Jésus dit : « Bienheureux sont-ils, ceux que l'on a persécutés dans leur cœur. Ce sont ceux-là qui ont connu ? le Père ! Bienheureux ceux qui sont affamés, parce qu'ils se rassasieront le ventre à [leur] désir ! »

74. Jésus dit : « Lorsqu'il vous reste de quoi partager, à vous, cela que vous possédez vous sauvera. Mais si vous ne pouvez partager [pour vous], cela, que vous n'avez point en vous, cela [. ?.] vous [... ra]. »

75. Jésus dit : « Je [...................]rai [............................] et personne ne pourra.........[.......... ....] [.......].»

76. [Quelqu'un] lui [a dit ] : « Parle à mes frères, pour qu'ils partagent avec moi les biens de mon père ! » Il lui a répondu : « Homme, qui m'a fait partageur ? » Il se retourna vers ses disciples et leur dit : « Que je ne sois point un partageur ! »

77. Jésus dit : a La moisson est grande mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez le Seigneur pour qu'il envoie des ouvriers à la moisson.»

78. Il a dit : « Seigneur, beaucoup sont autour de l'ouverture mais personne dans le puits ! »

79. Jésus dit : « Beaucoup se tiennent dehors à la porte, mais ce sont les solitaires seuls qui entreront dans la chambre nuptiale l. »

80. Jésus dit : « Le Royaume du Père est pareil à un homme, un négociant, qui a un fardeau et qui a trouvé une perle. Ce négociant est un sage : il a vendu le fardeau et s'est acheté la perle seule. Vous aussi, cherchez son trésor qui ne périt point, qui demeure, dans lequel la teigne ne pénètre pas pour ronger et [où] le ver ne détruit point. »

81. Jésus dit : « Je suis la lumière, celle qui est sur eux tous. Je suis le Tout, et le Tout est sorti de moi et Tout est revenu à moi. Fends le bois : je suis là; soulève la pierre et tu m'y trouveras ! »

82. Jésus dit : « Pourquoi êtes-vous sortis dans la campagne? [Est-ce] pour voir un roseau agité [par] le vent, et pour voir un h[omme avec des] vêtements [délicats] qui l'enveloppent ? [Mais ils sont dans les demeures des] rois et de vos grands, ceux que de [délicats vêtements] enveloppent, et ils ne connaissent pas la vérité! »

83. Dans la foule, une femme lui dit : « Bienheureux le ventre qui t'a porté et le sein qui t'a nourri ! » Il lui a dit : « Bienheureux ceux qui ont entendu la parole du Père et qui la gardent ! En vérité, des jours viendront où vous direz : Heureux le ventre qui n'a point engendré et ces mamelles qui n'ont point allaité ! »

84. Jésus dit : « Celui qui a connu le monde est tombé dans le corps; et celui qui est tombé dans le corps, le monde n'est pas digne de lui. »

85. Jésus dit : « Que celui qui s'est fait riche règne, et que celui qui a une force soit miséricordieux ! »

86. Jésus dit : « Celui qui est près de moi est près du feu, et celui qui est loin de moi est loin du Royaume. »

87. Jésus dit : « Les images apparaissent à l'homme, mais la lumière qui est en elles est cachée. Dans l'image de la lumière du Père, elle [ cette lumière] se révélera, et son image sera voilée par sa lumière. »

88. Jésus dit : «Maintenant, quand vous voyez votre apparence, vous vous réjouissez. Mais, lorsque vous verrez vos images qui se sont produites avant vous, qui ne meurent point et qui ne se manifestent point, quelle grandeur supporterez-vous ? »

89. Jésus dit : a Adam a été produit par une grande puissance et une grande richesse; mais il n'a pas reçu? [... .... ......] digne ? de vous, car il n'était pas digne [de ?] ne pas [être soumis?] à la mort. »

90. Jésus dit : « [Les renards] [ont] des [tanières] et les oiseaux ont [leurs] nids; mais le Fils de l'Homme n'a pas de lieu où incliner sa tête et se reposer. »

91. Il a dit, lui, Jésus : « Le corps qui dépend d'un corps est un malheureux, et l'âme qui dépend de ces deux est une malheureuse ! »

92. Jésus dit : « Les anges et les prophètes viennent vers vous : ils vous donneront les choses qui vous appartiennent. Vous-mêmes, donnez-leur ce que vous possédez et dites-vous : « Quel jour vont-ils venir, et prendre ce qui est à eux ? » ~ ~

93. Jésus dit : a Pourquoi lavez-vous le dehors de la coupe et ne pensez-vous pas que celui qui a fait le dedans, c'est lui aussi qui a fait le dehors?»

94. Jésus dit : « Venez à moi, car mon joug est excellent et mon autorité est douce, et vous trouverez pour vous le repos I ! »

95. Ils lui dirent : « Dis-nous qui tu es, afin que nous croyions en toi. » Il leur a dit : a VOUS scrutez l'aspect du ciel et de la terre mais Celui qui est par-devant vous, vous ne le connaissez pas et, cette conjoncture-ci, vous ne savez pas comment la scruter ! »

96. Jésus dit : « Cherchez et vous trouverez ! Mais les choses sur lesquelles vous m'avez interrogé en ces jours et que je ne vous ai point dites à ce moment, je veux maintenant les dire, et que vous ne les cherchiez plus. »

97. « Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens pour qu'ils ne le jettent point sur le fumier, et ne jetez pas les perles aux pourceaux de peur qu'ils ne le fassent [... ... ... ]

98. Jésus [dit : « ] Celui qui cherche trouvera [et, à celui qui voudra entrer], on ouvrira. »

99. [Jésus dit : « si?] vous avez de l'argent, ne le donnez pas à intérêt, mais [... ... ... ... ...] qui ne les prendra point de lui. »

100. Jésus dit : « Le Royaume du Père est pareil à une femme qui a mis un peu de levain [dans trois] mesures de farine et qui en a fait de grands pains. Que celui qui a des oreilles entende ! »

101. Jésus dit : « Le Royaume du Père est pareil à une femme qui porte un vase plein de farine et qui s'en va par un long chemin. L'anse du vase s'est brisée : la farine s'est répandue derrière elle sur le chemin sans qu'elle le sache et sans qu'elle sache y remédier. Lorsqu'elle est arrivée à sa maison, elle a posé le vase et elle a trouvé qu'il était vide. »

102. Le Royaume du Père est pareil à un homme qui veut tuer un grand personnage. Dans sa maison, il a dégainé l'épée et il l'a plantée dans le mur pour s'assurer que sa main serait ferme. Ensuite il a tué le personnage. »

103. Les disciples lui dirent : « Tes frères et ta mère sont là dehors l. » Il leur a dit : « Vous et ? ceux ? qui font la volonté de mon Père, ce sont là mes frères et ma mère; ce sont eux qui entreront dans le Royaume de mon Père. »

104. On montra à Jésus une pièce d'or et on lui dit : « Les gens qui appartiennent à César nous demandent les taxes. » Il leur a dit : « Donnez à César ce qui est à César, donnez à Dieu ce qui est à Dieu et, ce qui est à moi, donnez-le-moi ! »

105. « Celui qui n'a pas comme moi détesté son père et sa mère ne pourra être mon disciple, et celui qui a aimé s[on père e]t sa mère comme moi ne pourra être mon disciple. Ma mère, en effet, a [...... ...... ] [...... ........ ......] parce qu'en vérité elle m'a donné la vie. »

106. Jésus dit : « Malheur à eux, aux Pharisiens, parce qu'ils sont pareils à un chien qui est couché sur une part et qui [commet?] ce mal de ne point [la]manger et de ne point [en laisser] les déchets à manger. »

107. Jésus dit : « Bienheureux est cet homme qui connaît [à quel] point les voleurs vont entrer, afin qu'il veille, qu'il rassemble sa [...... ....], et qu'il se soit ceint les reins avant que ceux-ci soient entrés. »

108. Ils [lui] dirent : « Allons; prions et jeûnons aujourd'hui ! » Jésus dit : «Quel est donc le péché que j'ai commis, ou en quoi ai-je été défait ? Mais, quand l'époux sort de la chambre nuptiale. jamais alors on ne jeûne, et jamais on ne prie ! »

109. Jésus dit : « Celui qui connaîtra père et mère, l'appellera-t-on : " Fils de prostituée ! " ? »

110. Jésus dit : « Lorsque vous ferez que les deux soient un vous deviendrez fils de l'Homme et si vous dites : " Montagne, déplace-toi ! "&emdash;elle se déplacera. »

111. Jésus dit : « Le Royaume est pareil à un pasteur qui a cent brebis. Une d'elles, qui est la plus grande, s'est égarée. Il a laissé les quatre-vingt-dix-neuf autres et il a cherché cette seule [brebis] jusqu'à ce qu'il l'ait trouvée. Après avoir pris cette peine, il a dit à la brebis : Je t'aime plus que les quatre-vingt-dix-neuf [autres] ! »

112. Jésus dit : « Celui qui boira de ma bouche deviendra comme moi. Quant à moi, je deviendrai ce qu'il est, et ce qui est caché lui sera révélé. »

113. Jésus dit : « Le Royaume est pareil à un homme qui [a] dans son champ un trésor qui est [caché] et qui ne le sait pas. Il ne [l'a pas trouvé avant de] mourir, et il a laissé son [bien à son] fils qui ne savait pas cela. Celui-ci a pris ce champ-là, il l'a vendu, et celui qui l'a acheté est allé le labourer : [il a trouvé] le trésor, et il a commencé de prêter à intérêt à ceux [qu'il] veut ! »

114. Jésus dit : « Celui qui a trouvé le monde et qui s'est fait riche, qu'il renonce au monde ! »

115. Jésus dit : « Les cieux et la terre dureront devant vous, et celui qui vit de Celui qui est vivant ne verra pas mourir »&emdash;parce que Jésus dit ceci : « Celui qui se tient à soi seul, le monde n'est pas digne de lui. »

116. Jésus dit : « Malheur à cette chair qui dépend de l'âme et malheur à cette âme qui dépend de la chair ! »

117. Ses disciples lui dirent : « Quel jour le Royaume viendra-t-il ?&emdash;Il ne viendra pas quand on l'attendra. On ne dira pas : " Voici il est ici ! " ou : " Voyez, il est là ! " mais le Royaume du Père est répandu sur la terre et les hommes ne le voient point. »

118. Simon Pierre leur dit : « Que Marie sorte de parmi nous, car les femmes ne sont pas dignes de la vie ! » &emdash;Jésus dit : « Voici; moi, je l'attirerai pour que je la rende mâle afin qu'elle aussi devienne un esprit vivant pareil à vous, les mâles ! Car toute femme qui sera faite mâle entrera dans le Royaume des cieux. »

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Gnosticisme - introduction


"Dormons-nous depuis des millénaires ? Vivons-nous dans un univers de mirages où le réel n'est que le reflet d'un monde même illusoire ? Et ce que nous appelons conscience n'est-elle pas en fait une inconscience, impuissante à rendre compte de notre condition ? Bref, vivons-nous vraiment ou sommes-nous pris dans un piège cosmique, une énorme machination qui a vicié nos corps, nos pensées, notre histoire pour nous interdire d'être vraiment des hommes ?"

Définir la Gnose... Chose difficile lorsque l'on sait que les premiers gnostiques avaient des visions tellement différentes, qu'il y avait à l'époque autant de Gnoses que de Gnostiques. La Gnose n'est pas un concept dogmatique et figé, mais de toutes les Gnoses qui ont existé ou existent encore, on peut dégager des lignes maîtresses communes, et surtout un but commun.

Les Gnostiques construisent leur image du monde sur la connaissance et non sur la croyance et la Foi. Ils voient dans la matière, et le monde auquel nous appartenons, le produit d'un démiurge ennemi de l'homme, différent du Dieu inaccessible. Et à leurs yeux la vie et la matière sont une oeuvre manquée, porteuse d'une imperfection originelle matériellement décelable, que seule la Gnose peut combattre. Mais si l'homme est imparfait, il porte aussi en lui une étincelle divine, un feu, quelque chose qui vient du Dieu inaccessible et qui échappe à la "malédiction" de ce monde. Le but des Gnostiques est de s'arracher à cette malédiction de la matière pour retrouver l'Unité avec Dieu, opérer une sorte de retour vers une patrie perdue : "Quand vous ferez le deux Un, et le dedans comme le dehors, et le dehors comme le dedans, et le haut comme le bas [...] alors vous irez dans le Royaume." (Evangile selon Thomas, Métanoïa, logion 22) C'est d'ailleurs pour cela que les Gnostiques se sentent aussi perdus sur Terre que des aliens échoués sur une planète inconnue.

La pensée Gnostique des premiers siècles, qui a vu le jour en même temps et dans les mêmes lieux que le christianisme naissant, s'est démarquée des autres courants de l'époque, "c'est une pensée profondément originale, une pensée mutante" (Les Gnostiques, Jacques Lacarrière). Les Gnostiques sont des insoumis, ils refusent un monde gouverné par des "ombres d'hommes", ainsi que ses lois. C'est pourquoi les Gnostiques ont toujours refusé d'obéir aux pouvoirs temporels, et qu'ils rejettent des institutions comme le mariage, la famille ou la procréation. Les Gnostiques sont des insoumis et des révoltés, et si on y regarde de plus près on peut même dire qu'ils ont été des anarchistes de la première heure.

Le but de la Gnose et de ses pratiques parfois choquantes (sodomie, pratique de l'amour libre, etc...) est de susciter en l'Homme une véritable conscience (dont sont dépourvus les "ombres d'hommes"), d'éveiller cette étincelle divine qu'il porte en lui afin que ses actes et ses pensées acquièrent la permanence et la rigueur nécessaires pour échapper aux sortilèges du monde. La Gnose est une recherche de vérité et de connaissance dont le but ultime est le retour à l'Unité avec Dieu (ou le Tout, ou autre nom que l'on veut bien lui donner), afin de ne plus être soumis aux cycles des réincarnations (réincarnation en laquelle beaucoup de gnostiques croyaient). La Gnose est à la fois une synthèse de plusieurs courants de son époque et une pensée totalement nouvelle. Mais les Gnostiques des premiers siècles étant contre toute forme d'histoire ou de postérité, ils n'ont laissé que peu de traces, et leurs "anti-sociétés" ont été éphémères pour la plupart, faute de structures et d'institutions. Ce "défaut" a été pallié par les Cathares, néo-gnostiques du Moyen-Age, qui se sont dotés de structures et d'une société parallèle afin que leur mouvement puisse perdurer.

Traitée d'hérésie par l'Eglise Chrétienne, la Gnose est en réalité l'arbre dont cette même église est un surgeon. Et si la Gnose avait eu un dogme, on aurait même pu dire que l'Eglise Chrétienne est une branche hérétique de la Gnose. Ceci explique les liens entre le Christianisme et la Gnose, et les récupérations ultérieures que les fondateurs de l'Eglise Gnostique Apostolique ont fait dans les sacrements chrétiens (voir Historique de l'EGA).


Les origines
Gnose signifie « connaissance parfaite ». Ce qui caractérise les mouvements gnostiques n’est pas cette « connaissance », que d’autres traditions prétendent aussi posséder, mais plutôt la définition de Plotin : « Ceux qui disent que le Démiurge de ce monde est mauvais et que le Cosmos est mauvais ».

Devant les prétentions extravagantes de certains auteurs gnostiques, les Pères de l’Eglise, suivis par les historiens anciens et modernes, ont nié l’existence d’un enseignement ésotérique pratiqué par Jésus et continué par ses disciples. Mais en pratique TOUTES les religions de cette époque avaient un enseignement ésotérique…

Selon les témoignages des historiens anciens, c’est dans un cadre géographique allant de la vallée du Jourdain à l’Asie Mineure que les sectes se manifestent à l’époque des apôtres, avec Simon à Samarie, Nicolas à Antioche. Mais c’est en Babylonie, véritable lieu de rencontre des religions aux alentours du début de notre ère, que l’influence des anciennes croyances mésopotamiennes, de l’Iran, de la Grèce et de l’Ancien Testament ont jeté les bases du mouvement gnostique. L’influence de l’Ancien Testament se fit à travers des textes apocryphes marqués de l’hellénisme. Parmi ces livres, le Livre d’Enoch est un des rares à nous être parvenu.

Vers 120, les sectes gagnent Alexandrie, autour de Basilide, Carpocrate et Valentin. Valentin se rendit à Rome, où sa gnose voila ses mythes orientaux d’une exégèse philosophique mêlée de christianisme. A Rome, des sectes fortement influencées par les éléments orientaux continuent d’affluer. Les sectes se propagent, notamment en Espagne.

En Asie, de nouveaux inspirés surgissent : Mani qui fera une vaste synthèse des nombreux enseignements, et Audi, un chrétien qui se sépara de l’Eglise après Nicée. De l’Orient, le gnosticisme s’étendit jusqu’à la Chine.

Parmi les sectes, on retrouve : les kantéens en Iran, la secte importante des séthiens disciples de Simon, les barbélognostiques, les archantiques, les ophites (ou naassènes) aux pratiques hérités des mystères grecs, les pérates, …

Il semble qu’il y ait eu un gnosticisme à l’intérieur même du judaïsme, contemporain des sectes gnostiques traditionnelles, et dont les échos allaient se perpétuer dans la Kabbale.


Les sources
La plupart des essais anciens ont, faute de pouvoir s’appuyer sur des documents gnostiques originaux, hérité des erreurs d’appréciation des réfutateurs chrétiens qui combattirent les sectes, aux IV et V siècles, sans connaître mieux que des lambeaux de leurs doctrines déjà décadentes et sans tenir compte des mythologies orientales sur les vestiges desquelles le gnosticisme avait proliféré. Les sectes gnostiques étaient ainsi considérées principalement comme de simples hérésies nées du christianisme.

Des réfutateurs, les plus anciens témoignages datent de la bible elle-même, qui dénonce les hérésies et les faux prophètes, dont Simon de Samarie et le diacre Nicolas.

Pour la période jusqu’au III siècle, on ne possède que les récits des hérésiologues. L’établissement d’une histoire précise des mouvements gnostiques est impossible à cause de ce flou, et des livres dont les titres changent d’une version à l’autre et dont les véritables auteurs restent anonymes.

Pour la période du III au V siècles, les sectes s’étaient étendues en Egypte, où le sable conserva des écrits en copte. C’est pourquoi on retrouva, à partir de 1800, des textes dans les nécropoles égyptiennes. L’Evangile de Marie, le Livre Secret de Jean et la Sophia de Jésus ont été achetés en 1896 en Egypte dans un même lot de parchemin. En 1947, plus de 40 écrits perdus furent retrouvés dans une jarre à Nag-Hammadi, dont en premier lieu des écrits des sectes orientales, mais aussi des apocryphes mêlant christianisme et gnosticisme. Mais cette bibliothèque n’est qu’un « instantané » de la pensée gnostique de l’époque, les textes y étant constamment remaniés et modifiés.

Très peu de monuments ou objets relatifs aux gnostiques furent retrouvés.


Destin du gnosticisme
Les condamnations de plus en plus dures de la part des églises chrétiennes obligèrent les sectes gnostiques (et les manichéens) à se cacher, puis à disparaître. Les bogomiles et cathares sont plus de simples résurgences suscitées par la transmission d’écrits gnostiques déguisés en apocryphes chrétiens que de vrais gnostiques. Des survivances plus sérieuses de la gnose la plus philosophique se cachent dans la littérature alchimique. De même il y a intercommunication entre la littérature kabbalistique et certaines doctrines du gnosticisme hellénisé.

En Orient, l’invasion de l’islam permit aux sectes de survivre. Aux confins de la Mésopotamie et de l’Iran certaines sectes survécurent jusqu’au XII siècle. En s’associant à l’islam, le gnosticisme donna naissance à l’ismaélisme.

source

pour allez + loin:
Catharose
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Gnostic Friends Network